Titre énigmatique, non ? Une référence à l'excellent livre de Cormac Mc Carthy que je viens de lire et vous conseille. Rassurez-vous, je ne m'improviserai pas critique littéraire. Non, cette fois-ci je veux vous parler de ce que la route m'a permis une nouvelle fois de constater, à savoir, toujours et encore, que la distance entre le discours et les actes était de mise. "On dit ce que l'on fait, mais on ne fait pas ce que l'on dit". Voyez plutôt !
Cas N°1 : TPE
La semaine dernière je me rendais à Orléans et j'ai été doublé par un chauffard qui se prenait pour Schumaker avec un véhicule utilitaire. Il venait de faire une queue de poisson au véhicule que je précédais. J'ai eu droit à des appels de phare. Après avoir viré au raz de mon pare-choc, je constatais que ce véhicule était bardé de stickers mettant en évidence le savoir-faire et le sérieux de l'entreprise. Certifié ISO 9001, agréé ceci, agréé cela, le must du savoir-faire. Il y avait le numéro de téléphone de l'entreprise. Je m'arrêtais et décidais d'appeler. Le patron me répond au téléphone. J'ai commencé par le féliciter pour ses divers agréments, puis, je lui ai relaté les faits qui venaient de se dérouler sur la route et je lui ai fait la démonstration que le comportement de son collaborateur était catastrophique pour l'image de son entreprise. Il n'a pu qu'être d'accord et m'a remercié. Peut-être que le garçon s'est fait réprimandé ; tant mieux, j'assume. Si cela peut au moins lui faire prendre conscience qu'il met stupidement la vie d'autrui en danger.
Cas N°2 : Groupe international
La semaine dernière, cette fois-ci à Paris, je n'ai pas résisté à l'envie de photographier une voiture stationnée irrégulièrement sur un emplacement réservé aux livraisons. La berline était ornée d'un magnifique logo avec une superbe signature mettant en exergue l'excellence de l'entreprise en matière de prévention des risques... son coeur de métier. J'ai décidé d'envoyer la photo à l'entreprise avec un courrier d'accompagnement et je vais le transmettre au Directeur Général, au Directeur Commercial, au Directeur de la Communication et au DRH. Pourquoi autant d'interlocuteurs me direz-vous. Tout simplement parce que je souhaite passer outre l'éventuel cloisonnement de cette entreprise et jouer sur la transversalité des responsabilités engagées. Rassurez-vous, je me suis arrangé pour ne pas photographier la plaque d'immatriculation ; je veux dénoncer un comportement, pas son auteur. Bien sûr, je vous tiendrai informé des suites qui seront données à mon courrier.
Epinglé sur le vif, des cas comme cela il y en a tous les jours, et tous les jours la colonne débit du compte image des entreprises incriminées augmente. Comme je l'évoquais dans un précédent billet, "Ne nous y trompons pas, tout contact avec l’entreprise alimente l’image que s’en font les clients, comme l’ensemble des différents publics internes et externes de l’entreprise. Au-delà des supports de communication, la culture de référence, les individus, les prestations (produits, services, prix, SAV…) et les comportements de l’ensemble des salariés, des managers et de la direction sont autant d’éléments constitutifs de l’entreprise, de la marque. Tout est signe, tout est sujet à interprétation."
A l'heure du tout puissant et navrant "360°", mais après tout la survie du publicitaire consiste souvent à réinventer la roue, il est sidérant de constater que la composante humaine n'est pas encore prise à sa juste mesure. A quoi bon dépenser de l'argent en certifications, en moyens de communication, pour démontrer en une fraction de seconde que cela tient purement et simplement de l'incantatoire, de la posture. Ces petits riens de tous les jours mettent en lumière les effets pervers du cloisonnement dans l'entreprise, quand ils ne sont pas désastreux.
"Une marque est aussi une promesse (...) Les seules personnes qui peuvent délivrer cette promesse sont celles qui sont dans l'entreprise : l'ensemble des employés, c'est-à-dire le management et le personnel (...) C'est l'interne qui permet de tenir la promesse et de s'assurer que les clients sont satisfaits." Hans Snook, fondateur de Orange.
Bonsoir, bravo pour ce billet qui montre très concrètement l'écart entre la promesse d'une entreprise et le comportement de ceux qui sont censés la "délivrer". Surtout lorsqu'il s'agit de civisme et de sécurité sur la route!
Rédigé par : Perlette | 22 avril 2008 à 23:54
Edifiant, cela donne envie de préférer le train à la voiture, voire de conseiller un stage d'éco-conduite au dirigeant de la première société, ce qui représenterait un intérêt environnemental en plus de l'aspect sécurité ;-)
Plus sérieusement, il est vrai que chaque employé est un "ambassadeur" de la société pour laquelle il travaille, c'est un axe social que les entreprises devraient prendre en compte, en développant l'exemplarité et le sentiment d'appartenance aux valeurs qu'elle porte. Mais c'est encore promesse, ça, non ?
Rédigé par : Cédric | 23 avril 2008 à 13:15
Effectivement, porter un badge comme conduire un véhicule logotypé,implique d'adopter un comportement responsable en phase avec les fondamentaux du socle de marque d'une entreprise : mission/vision/promesse/valeurs.
Cela démontre l'importance si ce n'est l'urgence, de mettre en adéquation dans les entreprises et les institutions le management,la formation et la communication, ce que j'appelle le triangle vertueux de la congruence du discours et des actes.
Bertrand Desmier
Rédigé par : Bertrand Desmier | 24 avril 2008 à 08:50
Effectivement, excellent livre que la "la route". Il y est aussi question d ailleurs de fierté....celle qui manque parfois aux porteurs de badges, logos et autres identifiants et expliquent peut etre les comportements navrants (et pour l entreprise et pour le groupe social) évoqués dans votre billet.
De tous temps rendre les hommes "fiers" de leurs couleurs a été une condition nécéssaire gagner une bataille....non ?
Rédigé par : nuza | 05 mai 2008 à 11:55