Examinons les faits, tout en sachant que la critique est d’autant plus facile que l’on n’est pas soi-même aux affaires.
En première lecture, la gestion de crise de la Société Générale présentait toutes les qualités requises pour lui permettre d’être citée comme exemplaire et figurée comme telle dans les manuels et les cours de communication.
1. Détecter la crise à temps.
La Société Générale a détecté la fraude présumée avant qu’elle ne soit dévoilée par l’extérieur.
2. Savoir bien s’entourer pour mieux maîtriser
Une équipe de professionnels reconnus accompagne la banque, Image 7, Harrison&Wolf et Jean de Belot entourent le dircom. Dès lors, un seul objectif : maîtriser le discours pour éviter que l’information soit amplifiée et déformée et se propage dans le public de façon incontrôlée.
3. Avoir l’initiative, imposer sa vérité et bombarder
Jeudi 24 janvier, la Société Générale prend les choses en mains. Son site Internet diffuse une lettre adressée aux clients, une autre à ses actionnaires. A 11 heures, la presse est invitée au siège de l’entreprise. La troisième banque française, soucieuse d’afficher la plus grande transparence et sa bonne foi, expose sa version des faits avec un luxe de détails. La stratégie du bouc émissaire est adoptée. Jérôme Kerviel, est livré en pâture aux journalistes et donc, à la vindicte populaires et à l’ire des clients, actionnaires et autres collaborateurs de l’entreprise.
4. Distiller des messages pour tous les publics : le poids des mots et le choc des images
Sur France Info par exemple, Daniel Bouton, PDG, déclarera : « Nous avons découvert dimanche un incendie très grave dans une chambre de la maison et cet incendie risquait d’embraser la totalité de la maison… et même de se transmettre à la totalité du village »…« Il était de notre devoir absolu d’éteindre l’incendie dans la chambre et que la totalité de la maison ne soit pas atteinte. C’est fait ; La maison est en bonne santé »…« Kerviel est un chauffard qui roulerait en évitant tous le radars ».
La photo du jeune homme est diffusée, accompagnée d’un portrait peu flatteur.
« Timide - plutôt terne - sans génie – trader de base – terroriste – incendiaire – être fragile ».
5. Ne pas nier sa responsabilité et faire amende honorable
«Je comprends parfaitement votre déception, voire votre colère. Cette situation est parfaitement inacceptable. Je n’ignore pas ce que représente pour vous la chute du cours de l’action. Je vous prie d’accepter mes excuses et mes profonds regrets», écrit le PDG dans sa lettre aux actionnaires. Daniel Bouton a proposé sa démission, elle a été refusée. Il a néanmoins décidé de se priver de salaire et de bonus pendant les 6 mois à venir. Les responsables du trader sont « démissionnés » sur plusieurs lignes hiérarchiques.
6. Défendre la réputation de l’entreprise et consolider son image
La banque a su profiter de l’impact médiatique pour s’adresser à l’ensemble de ses parties prenantes, avec pédagogie, en montrant qu’elle n’avait pas cédé à la panique dans la tourmente. « Les mécanismes mis en place par le trader indélicat étaient compliqués… mais on les a compris et déjoués ». Les pertes abyssales ont été endiguées à temps, l’entreprise à sauver les meubles, mieux, elle sera quand même bénéficiaire.
Bravo !
Maintenant, en deuxième lecture, que retenir ?